Kaléidoscope de musées et monuments de par le monde, entre muséologie comparée et tourisme iconographique.

mercredi 19 novembre 2014

Kawana Mill, Whanganui River Road, Aotearoa, Nouvelle-Zélande


 
Accès gratuit, pendant les heures de jour. 

Si cette relique modeste du passé néo-zélandais ne mérite pas tout à fait le nom de musée, son ouverture « self-service » m’a donné envie de vous en parler. Nous sommes sur la Whanganui River Road, la route de la rivière Whanganui, un circuit d’environ 80 kilomètres le long d’une superbe rivière, dans la campagne de l’île du Nord de la Nouvelle-Zélande ; cette route touristique alterne points de vue sur la superbe vallée, maisons communautaires maories et églises fondées il y a plus d’un siècle par des missionnaires motivés. Ici, les monuments historiques n’ont pas plus de 160 ans, exceptés les « pa », les anciennes forteresses maories (les oppida de l’autre bout du monde ?), qui si elles fournissent de précieux renseignements aux archéologues, sont d’un intérêt limité au promeneur qui ne repère que quelques tertres et remblais effacés par le temps. 

Panorama à l'entrée de la Whanganui River Road

 Voici pour le contexte général. Nous voilà plus précisément sur la portion de route entre Koriniti et Ranana, et il y a à peine la place pour se garer devant le portail d’accès au moulin. Un panneau nous invite à entrer, mais en pensant à refermer la porte derrière nous. Un escalier peu large mais raide traverse un jardin verdoyant, envahi de chants d’oiseau. En bas, nous découvrons une petite maison, le « cottage du meunier », et le moulin à eau, le Kawana Mill. Un panneau rappelle que le camping ici est interdit ; nous sommes dans un lieu de mémoire. Ne voyant personne, nous craignons de devoir rebrousser chemin ; que nenni, il suffit de pousser la porte… on y entre comme dans un moulin (je n’ai pas pu m’en empêcher). 
Le cottage des meuniers

Le moulin

L'entrée du moulin


A l’intérieur, le mécanisme de la roue est complet, et tourne ; quelques outils évoquent le passé agricole de la région, et l’utilité du moulin dans la vie locale. A l’étage, où l’on peut contempler de plus près la roue à aube, des panneaux un peu passé mais complet racontent (tout en anglais) l’histoire de l’édifice. Construit en 1854, puis tombé en désuétude au début du XXe siècle, sa restauration a été prise en charge en 1954 et 1970 par des associations locales et des volontaires. Si le monument est modeste, le témoignage de dévotion envers ce rare vestige du passé et les efforts entrepris pour sa sauvegarde (et la documentation de cette dernière) sont touchants. 

Le rez-de-chaussée

Avec vue privilégiée sur la roue

Le premier étage

Ca date... mais ça a le mérite d'exister


Des coupures de journaux retracent la vie du moulin et sa conversion en monument
 En face, le cottage du meunier offre un aperçu de la vie quotidienne de la classe moyenne rurale à l’époque du fonctionnement du moulin, avec quelques explications sur ses occupants. Lors de notre passage, il est fermé, mais on en voit bien l’intérieur par les fenêtres. La disposition laisse penser qu’il doit être ouvert parfois.
Enfin, un escalier mène à une petite plate-forme au dessus de la rivière d’où l’on observe les tunnels creusés par les pionniers pour assurer l’approvisionnement en haut du moulin. Un second escalier, derrière le cottage, mène à des toilettes. 
Le cadre bucolique ne gâche rien

Le tunnel d'approvisionnement en eau
 
En remontant vers la voiture, on croise une boîte à dons, invitant le visiteur à l’obole pour l’entretien des lieux. Celle-ci a du nous porter bonheur puisqu’à la sortie du jardin nous avons eu la chance d’admirer dans les arbres un couple de hihi, des oiseaux endémiques devenus tragiquement rares.

 
Ce monument m’a plu par son accès libre, ouvert à tous vents, comptant sur la discrétion, le respect, et la générosité des visiteurs (qui ne doivent pas se bousculer, on est vraiment en rase campagne), un système qui ne marcherait pas partout. Si la médiation est un peu datée, il y a un réel effort d’explication et d’aménagement, qui compense agréablement le peu de moyens des administrateurs du lieu. Enfin, le point fort de l’endroit reste son environnement, absolument superbe ; rien que la faune et la flore qui l’entourent valent l’arrêt. 

Pour en savoir plus  :
La carte de la Whanganui River Road sur le site du syndicat d'initiatives de la région
Le site Pioneers in New Zealand (en anglais) sur l'histoire de la colonisation néo-zélandaise

mercredi 29 octobre 2014

Cable Car Museum, Wellington, Aotearoa, Nouvelle-Zélande


Accès gratuit. Musée situé juste à la sortie du dernier arrêt du Cable Car de Wellington (4$ la montée). Une petite demi-heure de visite (sans regarder les films).
L’établissement est dédié à l’histoire de cette ligne de funiculaire, une des plus vieilles, et toujours active, du monde, et l’importance qu’elle a eu pour la ville.
Le musée est doté d’un système de climatisation éteint lors de notre visite (on est en début d’été, il fait entre 20 et 25° durant la journée). Les textes sont tout en anglais.
Tout en anglais... ou presque !


On est accueilli à l’entrée par le vieux wagon du Cable Car, remplacé aujourd’hui par une machine plus moderne. Des mannequins sont disposés sur ses sièges. L’objet est amusant, il comporte sur les cotés externes des compartiments pour s’asseoir qui ne seraient surement plus aux normes de sécurité actuelles !
Le wagon occupe tout l’espace de cette première salle ; sur les murs qui l’entourent, des panneaux retracent l’histoire du quartier et de la construction de la ligne, à grand renfort de photographies d’époque, de plans et de graphiques.
Ce premier engin a été utilisé de 1902 à 1978, quand fut lancée une grande rénovation, avec de nouvelles voitures, et une nouvelle gare.







La deuxième partie de la salle abrite la boutique de souvenirs.

Avant de passer à la suite de l’exposition, on découvre un écran tactile avec un sondage pour les visiteurs du musée. Je suppose qu’on doit y répondre quand on quitte le musée par le même chemin (on ressort par la boutique ; malin !).

Est ensuite projeté un film sur Wellington et les cable cars, suivi d’une petite exposition sur les cable cars privés, qui rappellent les ascenseurs de Valparaiso, et le quartier de Kelburn. On y parle également de l’activité d’observation météorologique et astronomique dans les jardins botaniques, avec le grand Observatoire installé à quelques mètres de la gare. Sont exposés notamment des outils d’observation, mais le manque de cartels ne rend pas forcément la lecture aisée.
La deuxième salle d'exposition ; le film est projeté à gauche, hors cadre



Exemple de vitrine

L’exposition se termine au sous-sol, accessible par un ascenseur (on parle trop peu sur Le Musée Vivant de l’accessibilité handicapée ! on la constate si peu de par le monde !).

A l’étage inférieur, vitré sur une face, on a une très belle vue sur les jardins botaniques. En face de cette baie est installé un trolley-bus, un autre vestige des transports en commun de Wellington. Autour du trolley, une section intitulée Journey to Restauration explique le travail des restaurateurs qui a rendu possible cette exposition. Un film détaille certaines opérations réalisées alors.



Les panneaux expliquent l'histoire du trolley-bus...

... et de sa restauration.
Dans une deuxième salle, on découvre la Historic Winding Room, qui conserve le mécanisme historique du Cable Car. Là, des panneaux explicatifs retracent l’histoire de la salle, sa conservation, et sa rénovation suite à un incendie. On nous explique également comment marche le système mécanique exposé là. Une vitrine expose des outils de l’époque de la construction des lieux.

Vue de la salle des machines depuis l'entrée




Vue de la salle des machines depuis le fond de la salle


Somme toute, ce musée n’est pas immense, mais il est agréable et bien conçu. Je n’aurais peut-être pas payé pour le visiter (j’apprécie donc grandement sa gratuité !) par manque d’intérêt personnel pour le sujet, n’étant pas passionnée par l’histoire technologique des transports en commun. Cependant, je suis contente de l’avoir vu, car il contient quelques curiosités agréables, et j’aime leur traitement du sujet ; simple sans être basique, documenté sans être assommant, et avec une réelle communication sur le travail de conservation et restauration inhérent.

 Pour en savoir plus :

dimanche 19 janvier 2014

Musée des textiles et des costumes de la reine Sirikit, Palais Royal, Bangkok, Thaïlande

Inclus dans la visite du palais royal, 500 baht (environ 15$). Photographie interdite (et une armée de gardiens patibulaires y veille).
Oups ! La photographie étant interdite, les photos de l'intérieur du musée ont été prises... hum... discrètement. Elles ne sont donc pas très bien cadrées... merci de votre indulgence !
L'entrée du musée
Le musée, tout neuf, vient d’ouvrir. Il est entièrement climatisé, et les capteurs répartis dans tout le musée indiquent une température moyenne de 22°5 et une hygrométrie entre 52 et 54%.
Le rez-de-chaussée abrite un grand hall, avec la billetterie, les contrôles de sécurité, des toilettes, un auditorium, une bibliothèque et une grande boutique, très belle, mais très chère pour les standards thaïlandais.

Le hall, depuis l'escalier d'accès aux collections permanentes
 Les collections permanentes se situent à l’étage, auquel on accède par un bel escalier à double volée.
Dans les salles d’exposition, toute la lumière est artificielle, et assez douce dans les salles de costumes. Les mannequins et le mobilier sont adaptés à leur fonction et offrent tout le soutien nécessaire à l’exposition de textiles.
Les vitrines abritant les costumes sont un peu étranges : de loin, elles semblent floues, et en s’approchant on découvre les expôts, la transparence de la vitre dépendant de l’angle sous lequel on regarde la vitrine. 

Les vitrines mi-floues mi-raisin de la première salle
 La première salle expose exclusivement des tenues de la reine (et une chemise du roi) Sirikit, dont le musée tient son nom. Les tenues sont variées : tailleurs très occidentaux, robes de soirée à plumes, chemises plus sobres… La plupart sont griffées Balmain, et on nous explique qu’elles sont faites de textiles issus de l’association SUPPORT, un organisme caritatif fondé par la reine il y a plusieurs décennies pour perpétuer et promouvoir les traditions textiles thaïlandaises et offrir un revenu aux femmes.
Chaque costume est accompagné d’une tablette vidéo sur laquelle défilent le cartel développé (titre, date de création, créateur, évènement) et une photographie de la tenue portée par la reine. Toutes les explications sont bilingues thailandais-anglais.
On trouve des sièges un peu partout pour s’asseoir et admirer les collections, qui sont très belles.

La deuxième salle commence par une introduction au costume thaïlandais traditionnel. Il est expliqué qu’un décret passé en 1941 obligea la population à adopter des tenues occidentales ; suite à cette « acculturation », la royauté a vu la nécessité de créer un costume traditionnel, symbole de l’identité siamoise.
Une petite salle sur le coté diffuse des diapositives de photographies XIXe afin d’admirer les costumes d’avant le décret ; dans la salle principale, une télé diffuse une animation de sept minutes expliquant la création et le pliage afin de composer un sabai, un phaa nung et un shong krabon (haut rappelant le sari, pantalon drapé, et robe).
C’est dans cette zone que sont exposés les tissus les plus anciens, des phaa nung datant du XIXe siècle (en anglais « hip wrapper »), les pantalons drapés issus des collections royales. Est développée une réflexion sur le rôle du costume dans l’identité nationale, sa construction par les monarques, et son développement au XXe siècle. 

Une vitrine de tissus anciens
 S’ajoutent à l’exposition des panneaux explicatifs sur les techniques de conservation modernes mises en place dans le musée (par exemple la congélation des costumes et un système de quarantaine afin d’éviter une peste animale, ou la présence de capteurs atmosphériques qui réalisent des relevés minute par minute).
Dès l’entrée de cette deuxième salle, on est accueilli par une grande photographie de la reine en robe thaïe en 1965 dans le magazine Vogue. Les textes sont clairement de parti pris, la souveraine étant célébrée pour son élégance, et présentée comme la première femme asiatique à figurer dans Vogue et à être reconnue à l’international comme un modèle de beauté.
La deuxième partie de la salle présente de nouveau des costumes de la reine, mais uniquement des variations sur la robe thaïe décrite précédemment. Cette fois-ci, pas de tablettes individuelles, mais une tablette par vitrine, et chaque robe est accompagnée d’un cartel développé. Au fond, sur un grand écran, défilent des photographies du couple royal, dans un ordre chronologique, qui présentent cinquante ans d’élégance.

Photographie du Vogue de février 1965, trouvée sur pinterest
 En passant dans la troisième salle, on change d’ambiance ; plus de lumière, moins d’expôts. Une première section est consacrée aux déplacements de la reine dans le pays, à sa vie, son implication dans les bonnes œuvres… Il y a beaucoup de films, de photographies, de sons (diffusés de manière directionnelle, donc il n’y a pas de cacophonie).
L’espace est compartimenté par de grandes parois de verre striées de fils de couleur, rappelant de grands métiers à tisser.
La deuxième partie de la salle présente un film sur les techniques de création textile, différents échantillons de tissus traditionnels sous vitrine, et tout un pan de mur est dévolu à des « hands-on exhibits » : écheveaux de soie naturelle, traitée chimiquement, traitée naturellement, les différentes teintures… on peut toucher et comparer les différentes fibres. L’ensemble est très didactique, mais les écheveaux ont déjà commencé à souffrir ; l’effet général est bien, mais combien de temps va-t-il durer ? Le musée est tout neuf ; dans quel état sera cet atelier dans six mois ? 

Les écheveaux de soie à toucher

Patchwork et vidéo explicative
La quatrième et dernière salle expose de nouveau des costumes de la reine, dans une vitrine centrale, mais dans un registre plus « décontracté » (si tant est qu’une reine puisse s’habiller casual…) : tenues d’intérieur, vêtements de sport… Dans les vitrines latérales, des textiles traditionnels décorés selon différentes techniques. Une vitrine présente notamment la broderie à base d’ailes de scarabées, assez impressionnante.

Les ailes de scarabée accrochées sur des fils de nylon autour de la veste créent un joli jeu de lumière
 En sortant des salles d’exposition, avant de se diriger vers la sortie, un panneau présente l’histoire du bâtiment qui abrite le musée, le Ratsadakorn-Bhibhatana Building, palais néo-classique de style « italien », construit dans les années 1870 après la destruction de l’édifice à usage militaire qui l’a précédé.  

Liens utiles :
La biographie de la reine Sirikit (attention les yeux)
Le palais royal de Bangkok