Entrée 5€, nombreuses réductions
à moitié prix. Ouvert tous les jours de 10 à 17h30 (hiver)/ 18h30 (été). Visité
le 5 septembre 2016 en 1h15.
Elu Musée de l’année par l’APOM,
l’association des muséologues portugais, le musée occupe ce qui fut les bureaux
de l’organisation caritative de la Misericordia du XVIe siècle à 2013. La
reconversion semble donc couronnée de succès.
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L'entrée de l'espace d'exposition |
On est accueilli dès l’entrée par
un personnel très présent (l’appareil photo n’est pas encore allumé qu’on se
fait vivement rappeler « no flash ! ») ; on prend un ascenseur jusqu’au
3e étage, d’où on redescend le long d’un parcours bien construit et
indiqué. L’accessibilité est garantie par des rampes et des dispositifs adaptés
d’un étage à l’autre. Tous les cartels sont bilingues et les lumières
n’émettent aucune chaleur. La première impression est donc plutôt bonne.
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Vue de l'entrée de la première salle |
La première salle s’attache à
l’histoire des lieux, divisée en séquences chronologiques et thématiques.
Un premier panneau propose la
représentation des sept actes de miséricorde tels qu’entendus par la Bible,
évoquant la fonction originelle des lieux. On apprécie la richesse du texte
introductif, soutenu par un tableau, dont l’iconographie est bien
détaillée : Notre-Dame de la Miséricorde.
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Le texte introductif |
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La patronne éponyme de l'institution |
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... et son cartel, bilingue et détaillé. |
Les lumières sont modulables, les
salles entièrement climatisées et l’atmosphère est contrôlée. Des stores
bloquent la lumière directe, des détecteurs de fumée et des extincteurs
assurent la sûreté des lieux. On observe peu de dispositifs de mise à distance,
ceci étant bien compensé par la présence et la vigilance des agents de
surveillance. Le parcours est clair et lisible, complété par une musique
d’ambiance discrète mais évocatrice.
Cette première salle consiste
tout de même essentiellement en portraits des grands acteurs et bienfaiteurs de
l’institution, et la présentation parvient à être intéressante malgré un sujet
de base pas forcément facile. De nombreuses explications sont illustrées
efficacement, et des dispositifs intelligents empêchent la monotonie de
s’emparer de ce qui pourrait être une banale galerie de portraits.
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Exemple de dispositif intéressant : cet oculo est pointé sur la cathédrale |
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Ladite cathédrale |
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Et le cartel affilié |
Chaque séquence détaille un volet
spécifique des missions de la Misericordia, évoquées par des expôts issus des
collections « classiques » (sculptures et peintures),
« archéologiques » (rosaires, objets du quotidien retrouvés…) ou
d’archives, avec des documents dont on ne sait pas toujours si l’on est en
présence d’un original ou d’un fac-similé.
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Un des "parchemins" exposés dans cette première salle |
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... et son cartel, qui le date des XVe-XVIe siècles... |
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... et cet autre cartel sur le coté. Nous sommes donc en présence d'un cartel qui l'authentifie, et d'un autre qui en fait une copie... |
Le choix de cartels groupés mais
sans numérotation rend la lecture peu claire, et si l’effort de faire des textes et cartels bilingues est
très louable, nous observons parfois des traductions anglaises un peu bancales.
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Exemple de vitrine liée à l'activité de soins |
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Et sa planche de cartels |
La première de ces missions fut
la gestion d’hôpitaux, On découvre ensuite l’aide aux prisonniers, menée dès
1594, qu’elle soit médicale ou judiciaire, puis l’aide et l’hébergement des
plus pauvres, l’assistance aux aveugles, par la fondation d’écoles et
d’imprimerie spécifiques, et enfin la tenue d’orphelinats, notamment à travers
la personnalité d’Antonio Carneiro, peintre expressionniste issu d’une de ces
institutions.
Avant de quitter cet étage, une
vidéo présente la multitude d’activités toujours chapeautées par la
Misericordia de Porto, créant une continuité intéressante entre les missions
menées au fil des siècles et son insertion dans le contexte actuel. Par contre
l’écran est installé dans un lieu de passage, sans siège en face.
En revenant sur nos pas, on
pénètre dans la deuxième salle du 3e étage, galerie de portraits des
donateurs et mécènes de la Misericordia. Un écran tactile permet de feuilleter
le livre d’honneurs des bienfaiteurs du XXe siècle. Un panneau intitulé
« bienfaiteur du mois » permet de découvrir une personnalité de Porto.
A l’envers de la galerie sont évoqués les bienfaiteurs anonymes.
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Le texte introductif de cette deuxième salle |
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Les bienfaiteurs de la Misericordia |
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Un écran tactile permet de naviguer dans les archives numérisées d'hommages aux donateurs |
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Le "bienfaiteur du mois" |
On emprunte ensuite un escalier
pourvu d’un puits de lumière pour descendre au 2e étage et à la
troisième salle du parcours muséographique, consacrée aux collections de
peinture et sculpture de l’institution, qui s’étendent du XVe au XIXe siècle.
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La cage d'escalier moderne sur un coté du bâtiment, une excellente manière de rendre intégralement accessible un monument historique |
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La salle de Beaux-arts, petite mais riche |
La présentation est aérée,
compréhensible, et les cartels développés sont foisonnants d'informations, tout en
restant intelligible ; ils détaillent les iconographies, expliquent la
présence d’une œuvre dans la collection ou créent un lien entre différents
expôts. Quand des œuvres présentent un envers, elles sont accrochées de manière
à ce qu’on le voit. En bref, un ensemble beau et didactique à la fois,
vulgarisant sans simplification, tout ce qu’on aime.
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Des panneaux de procession exposés de manière originale... |
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... afin de pouvoir profiter de leur envers également. |
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On peut tout de même déplorer l'absence d'éléments de datation et le manque d'identification des artistes, souvent restés anonymes ; par manque d'informations ou par manque de recherches ? |
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Le plus grand format de la galerie |
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Une analyse stylistique qu'on retrouve rarement dans les cartels détaillés, mais une fiche d'identité relativement incomplète |
La quatrième salle, au 1er
étage, abrite le Trésor que toute église qui se respecte se doit de posséder,
composé essentiellement de pièces d’orfèvrerie et vêtements liturgiques. Les
objets sont classés typologiquement (crucifix, calices…). Un texte explicatif
précise qu’il ne s’agit que d’une petite partie de la collection.
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Impossible de se perdre ! |
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La salle du Trésor |
La cinquième salle s’attache à
l’histoire de l’église, jouxtée au musée, que nous visiterons en dernier. Une
séquence rappelle l’évolution des décorations intérieures et les différentes
apparences que peut avoir une église, notamment par l’accrochage de trois
grands panneaux de retables. A coté de la cimaise on peut observer un petit
diorama les restituant à la place originale dans l’église.
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Le retable en question |
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Tentative de photographie du diorama ; un peu compliqué ! |
La sixième salle, située dans les
anciens bureaux de l’institution, encore en service quelques années plus tôt,
évoque l’administration historique de la Misericordia, dans un décor XIXe
finement restauré.
L’éclairage, assuré par de
grandes barres verticales de LED est un peu en décalage de cette period room mais garantit une
luminosité douce.
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Vue de la sixième salle |
La septième et dernière salle de l'espace muséographique n’est
pas des moindres. On trouve enfin des sièges pour se reposer, mais surtout pour
admirer le grand tableau intitulé Fons
Vitae auquel elle est consacrée.
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Vue de la septième salle et son clou du spectacle, les Fons Vitae |
Ce retable exceptionnel des années 1515
est de facture flamande et illustre, selon les dires du musée « la
vitalité des échanges » entre Porto et les Flandres à la Renaissance. De
longues explications sont consacrées à cette iconographie très particulière,
entre ésotérisme et propagande royale. Au verso du tableau est visible la
radiographie de l’ouvrage, réalisée il y a quelques années durant une campagne
de restauration. Elle permet de comprendre la structure de l’œuvre (un panneau
de 267 x 210 cm demande une construction complexe !) et
d’observer des repentirs et des modifications iconographiques ou stylistiques.
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Le cartel détaillé... |
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... et la vue de l'arrière du tableau. |
Une œuvre contemporaine opère un
contrepoint aux Fons Vitae, le My blood is your blood de Ruy Chafes.
Rappelant l’iconographie du tableau, autour du sang christique, l’œuvre crée un
pont entre l’espace intérieur du musée et l’espace public urbain ; ce
faisant, il lance un questionnement intéressant sur le rapport du public à
l’institution, que l’on pense à l’œuvre caritative qui exerça entre ces murs
durant des siècles, ou au rôle nouveau qu’elle se propose d’endosser ces
dernières années en tant que musée.
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My blood is your blood, vu depuis l'intérieur de la salle |
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La partie extérieure de l'oeuvre d'art |
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... et son cartel. |
Le parcours muséographique à
proprement parler est fini, mais pas la visite. On a ensuite le plaisir de se
promener dans un préau fin XIXe/début XXe en fer forgé et carreau ciment,
abritant une exposition de sculptures par le même Ruy Chafes.
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Vue depuis la sortie de la septième salle |
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Le rez-de-chaussée sert d'espace d'exposition temporaire |
Dans une alcôve est projeté un
film d’animation 3D immersif, sur l’urbanisme et le développement du quartier
autour de l’église de la Misericordia. Le son n’est pas très bon, le graphisme
n’est pas incroyable, mais l’effort est louable.
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Difficile de rendre un film en photo, mais l'idée est que l'on se promène dans le quartier de la Misericordia au XVIIIe siècle, en remontant depuis les rives du fleuve |
Enfin, on accède par ce même
préau à la sacristie, une petite chapelle, et l’église, dont la fondation date
du XVe siècle, mais qui fut largement remaniée au XVIIIe siècle par les bons
soins de Nicolau Nasoni, architecte et décorateur phare du Porto baroque.
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L'église, parée de ses azulejos bleus et blancs |
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La sacristie |
Pour
être tout à fait honnête, nous sommes allés voir ce musée un peu à reculons,
après plusieurs jours de promenade intensive, donc les mollets lourds, et le
thème ne nous excitait pas plus que ça ; mais le « label » Musée
de l’année décerné par l’AMOP a chatouillé notre curiosité, qui a été plus
forte que la fatigue. Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on ne l’a pas
regretté. Il s’agit vraiment d’un beau musée, que ce soit par l’architecture,
respectée dans son intégrité malgré une accessibilité totale, les collections,
qui contiennent quelques très belles pièces mais qui sont surtout très bien
mises en valeur, et surtout la muséographie, moderne, aux standards de
conservation préventive respectés et à la médiation intelligente.
Bref, un bel exemple de réussite de valorisation du patrimoine comme on aimerait en voir plus souvent.
Pour en savoir plus :